Utiliser ce que la nature met à notre disposition pour offrir une seconde vie à du linge de maison ou un vêtement, c’est tout le principe de la teinture végétale. Les plantes dites tinctoriales, mais aussi les pelures d’oignon, fanes de carottes, ou encore peaux d’avocat constituent en effet de fabuleux pigments naturels.
Et nul besoin d’être un expert pour s’initier à la teinture végétale. Il suffit de connaître quelques principes simples pour obtenir un résultat bluffant avec des couleurs éclatantes.

Pour plonger dans le grand bain de la teinture naturelle, nous avons fait appel à Suzy et Mélanie, les créatrices de l’association Colore ton Monde qui ont accepté de partager leur expérience et leurs conseils. Fondée en 2011 et basée à Sceaux (Hauts-de-Seine), l’association propose des cours, des formations, des stages à des particuliers, à des centres sociaux, des écoles mais aussi des professionnels du secteur textile (décorateurs, stylistes, artisans…), pour apprendre à teindre les tissus avec des végétaux de façon écologique tout en créant du lien.
Pour l’association Colore ton Monde, les plantes tinctoriales sont un fil conducteur qui a le pouvoir de lier différents milieux, âges et origines. Passionnant !
Teinture végétale : les bons choix de plantes


Teindre un tissu de façon naturelle passe en premier par le choix de la bonne plante. Toutes les plantes contiennent des pigments qui ont le pouvoir de teindre mais toutes n’offrent pas de colorations résistantes au temps qui passe, au lavage et à la lumière.
La garance, l’indigo ou le réséda sont les plus utilisées. Il existe nombre de recettes historiques car déjà nos ancêtres savaient sélectionner les plantes dites « grand teint », c’est-à-dire qui tiennent dans le temps. C’est le cas de la garance (pour des nuances de roses, rouges, marrons) et du réséda (nuances de jaune) dont l’utilisation passe par l’étape du mordançage.
Le mordançage est un procédé destiné à créer une affinité chimique entre le textile et la teinture pour fixer la couleur et la rendre lumineuse. Selon la nature du tissu (animale ou végétale) on utilisera pour le mordançage de la noix de galles, de la pierre d’alun ou encore de l’eau de soja. Ici encore il existe de nombreuses recettes.
L’indigo quant à lui est une teinture bleue violacée (parfois rougeâtre) extraite de différentes plantes. Aussi incroyable que cela puisse paraître, il existe 800 espèces de plantes contenant une substance, qui au contact de l’oxygène forme l’indigo. En revanche, une dizaine seulement présente une concentration suffisante pour être cultivée et utilisée en teinture.


Quelle que que soit la méthode utilisée pour la teinture à l’indigo, l’objectif est d’amener la couleur à se fixer sur le tissu. A la sortie du bain la couleur ainsi obtenue est jaunâtre, mais l’exposition à l’air entraîne une oxydation permettant au bleu de se révéler. La magie de la chimie !
Quels tissus pour une teinture réussie ?
Pour se lancer dans la teinture de tissus naturelle, les fibres naturelles sont à privilégier. Dans un souci de cohérence de la démarche, mais aussi pour des raisons techniques, les fibres synthétiques se prêtant moins à l’accrochage des pigments.
Les fibres naturelles se divisent en deux catégories : les fibres végétales (le lin, le coton) et les fibres animales (la soie, la laine).
Les fibres végétales
Le lin est une des herbes les plus anciennement cultivées par l’homme. Les fibres sont contenues dans la tige. Leur transformation permet d’obtenir une toile très absorbante et donc relativement facile à teindre.



Le coton est quant à lui issu d’une plante arbustive. En fanant, les fleurs de cette plante libèrent des graines enveloppées de fibres qui après transformation donneront le fil de coton.

Pour la teinture naturelle, privilégiez le coton biologique, cultivé sans pesticides et sans engrais chimiques.

Les fibres naturelles d’origine animale
Il s’agit essentiellement de la soie (issue du cocon des vers à soie) et de la laine. La forte teneur en protéine des ces fibres d’origine animale explique leur capacité d’absorption élevée et donc leur facilité à être teintes.
La soie est une fibre aussi agréable à porter (elle a d’incroyables propriétés de régulation thermique) que fragile. En effet lorsqu’elle est mouillée, elle perd 20% de sa solidité. On comprend mieux pourquoi on parle d« art de la soie », un art né en Chine il y a plus de 5000 ans.

Quant à la laine, elle est sans nul doute liée aux pratiques textiles les plus anciennes.

Le secret de la teinture naturelle : laisser du temps au temps
Comme tout procédé naturel, la teinture végétale a sa part d’imprévisibilité et de mystère. Teindre naturellement c’est presque méditatif. Il faut prendre son temps, attendre patiemment la montée en température du bain, tourner le bouillon… Et surtout, comme le dit Suzy de Colore ton Monde, il faut « accepter que la couleur vit« . Pour l’indigo c’est la répétition des bains qui va permettre de foncer la couleur et dans certains pays, cela peut prendre jusqu’à 6 mois !
S’essayer à la teinture naturelle c’est aussi chercher, tester, expérimenter. Si le thé ou la betterave ne tiennent pas dans le temps, les fanes de carotte ou l’avocat peuvent constituer des pistes pour se lancer à domicile à condition de bien mordancer son support.
Pour ce faire, cette vidéo extraite d’un cours Artesane vous sera certainement utile.
S’initier à la teinture végétale
Les ouvrages à lire
Voici quelques livres pour creuser le sujet de la teinture naturelle :
- E. Dumont, Teindre avec les plantes. Les plantes tinctoriales et leur utilisation, Ulmer (2010)
- D. Cardon, Le monde des teintures naturelles, Belin (2014)
- F. Millet, Le grand guide des huiles essentielles, Marabout (2015) : dans cet ouvrage vous trouverez les indications chimiques des plantes ce qui permettra d’optimiser la teinture.
- K. Neumüller & D. Luhanko, Indigo. Teinture, fabrication et applications, Eyrolles (2019)
- M. Marquet (préface D. Cardon), Guide des teintures naturelles : Plantes à fleurs, Belin (2019)
- A. Wolff, Teintures végétales : carnet de recettes et cahier d’inspirations, Eyrolles (2019)
Stages et ateliers d’initiation à la teinture naturelle
- COLORE TON MONDE
www.coloretonmonde.org
4 avenue du Plessis
92330 Sceaux
Tel : 06 79 52 82 07
coloretonmonde@yahoo.fr
- WHOLE STUDIO TEXTILE
Whole studio textile et bio design
86 rue JP Timbaud,75011 Paris
Ouvert au public tous les samedis de 12h à 19h et du lundi au vendredi sur rendez-vous
www.whole.fr
N’hésitez pas à rechercher autour de chez vous, il existe aujourd’hui de nombreuses associations et artisans qui proposent des initiations à la teinture végétale.
A la recherche des ingrédients
Où trouver des matières à teindre ?
En premier lieu chez vous ! La teinture naturelle est une solution idéale pour pimper et donner une seconde vie à vos t-shirts, tote-bags, torchons, draps, etc.
Pour vos projets couture, vous trouverez des matières naturelles prêtes à teindre chez :
Les eshops spécialisés dans les tissus biologiques comme Fil Etik, Amandine Cha ou Hysope Tissus proposent également des références de double gaze, crêpe de coton, gabardine ou encore natté de coton écrus
Où acheter des kits de teinture naturelle ?

// Crédits photos
En une de l’article, de gauche à droite : WHOLE / WHOLE / L’atelier Koupaïa
2 commentaires
C’est très intéressant! Merci
Passionnant !
Merci Perrine.